20190515

SENAILHAC (De) Éric Marie Joseph Ludovic 1922 - 1945.


Né le 22 juillet 1922 à TOULOUSE (Haute-Garonne).

Mort au combat le 15 avril 1945 à KÜRZELL (Bade-Wurtemberg. Allemagne).

Fils de Charles Marie Raymond Alphonse de SENAILHAC (1892-1961) et de Marie-Antoinette Jeanne Josèphe Françoise Élisabeth Lucie de TOULOUSE LAUTREC (1898-1980).- Mariés et décédés à RASBASTENS (Tarn).

Mise à jour septembre 2025

Après avoir terminé ses études secondaires au Lyautey (CASABLANCA – Maroc), il rentre dans une classe de mathématiques du lycée Gouraud (RABAT – Maroc. Institution d’enseignement la plus importante durant la période du protectorat).

Note : Charles De SENAILHAC entrepreneur de Tabac au Maroc à KENITRA (Durant le protectorat français, la ville portait le nom de PORT LYAUTEY).

De retour en France, il prépare l’École militaire de SAINT-CYR dans un lycée à TOULOUSE (Haute-Garonne).

Dès sa plus tendre enfance, De SENAILHAC paraît marqué pour son destin exceptionnel. Le héros vibrant aux malheurs de sa patrie est tout entier déjà dans le garçonnet de sept ans qui sanglotait un soir dans son lit alors qu'en famille, on venait de chanter " les cuirassiers de REICHSHOFFEN , navré que tant d'héroïsme n'eût pas sauvé la France.

Note : Le 6 août 1870, la bataille de REICHSHOFFEN (ou de FROESCHWILLER-WOERTH), célèbre pour les charges et le sacrifice des cuirassiers français face aux prussiens en avantage numérique de trois contre un.

Celui qui se sacrifiera en portant secours à ses camarades de combat est aussi celui, qui, étudiant, se privait, se dépouillait de tout pour les autres : interne au lycée de Toulouse, il partageait les colis que sa famille lui envoyait du Maroc entre ses camarades déshérités soumis à de cruelles privations.

Quelques jours après la rentrée, survint le débarquement alliés du 8 novembre 1942 en Afrique du Nord : l'entrée des allemands en zone " non occupée " qui en fut le contre coup parut intolérable à l'âme fière et sensible De SENAILHAC, et en même temps, ce Maroc, qui lui était déjà si familier, devint dès lors, pour tout ce que la jeunesse française comptait de cœurs ardents, le centre du ralliement pour le combat suprême.

Le 27 décembre 1942, il franchit les cols pyrénéens par une de ces tempêtes de neige qui ont enseveli tant de vaillants (la surveillance allemande était moins stricte par mauvais temps).

Arrêté par la police espagnole, il passe cinq mois de détention, une période très pénible à bien des égards. Libéré, il parvient à traverser la méditerranée, arrive au Maroc et s’engage au 3e Régiment de Spahis Marocains de MEKNES (Quartier Baudot).

C’est le même homme qui, étudiant et plus tard durant les campagnes de France et d’Allemagne, va s’attacher aux valeurs de partage et d’assistance, alors qu’il pouvait obtenir une permission de faveur, écrira à sa mère :

" Je vous en prie, pas de piston pour les permissions ; c'est trop injuste pour ceux qui n'en ont pas " ; et combien pourtant il eût aimé partir, lui qui était le plus tendre des fils et qu'une fiancée attendait. D'une sincérité totale, d'une franchise presque agressive, trop droit pour être capable de flatterie ou même " d'adresse ", passionné de justice, de SENAILHAC était la noblesse même. Au surplus, de ce jeune patricien, Toulouse-Lautrec par sa mère, admirablement racé, magnifique de stature, émanait ce rayonnement naturel qui fait le chef-né.

Note : Fiancé à Marie-Thérèse Odile RUFF (1923 - 2010) - 1 Enfant Jean.

Dans le cadre de l'arrivage du matériel américain, appelé à équiper le 3e R.S.M et sa réorganisation en une unité de reconnaissance, le régiment est rassemblé à  MARTINPREY-du KISS (frontière entre le Maroc et l’Algérie) et à STAOUELI, localité située à environ une vingtaine de kilomètres à l’ouest d’ALGER (Algérie)..

De là, il est envoyé à soixante-quinze kilomètre encore plus à l’ouest, à l’École militaire des cadres de CHERCHELL Après sa formation, il est affecté au 2e Régiment de Chasseurs d’Afrique.

Note. À l’École des Élèves Aspirants (E.E.A) de CHERCHELL (1er octobre 1943 – 15 avril 1945), il est en formation de chefs de section et de peloton. 3e Promotion – Libération).

Lorsqu’il arrive au régiment, celui-ci est en formation (entraînement) dans le sud oranais pour se préparer au futur débarquement de Provence.

Septembre 1944. De SENAILHAC débarque avec son régiment à la NARTELLE, s’ensuit la remontée de la Vallée du Rhône, les Vosges, l’Alsace et l’Allemagne.  Dès lors, il vit enfin une époque glorieuse dont il a rêvé tout enfant.

Après les combats de novembre 1944 en Alsace, il est cité à l’ordre du régiment.

" Chef de patrouille de chars légers ; depuis le débarquement en France s'est toujours montré extrêmement brillant dans toutes les opérations auxquelles il a participé : d'une bravoure sans pareille et méprisant totalement le danger, il est, de plus, un chef manœuvrant habilement et audacieusement."

« Le 19 novembre 1944, à FRIESEN, il a exécuté une patrouille de liaison particulièrement délicate, au cours de laquelle il a détruit trois armes automatiques et une mitrailleuse lourde ennemie. En pointe de la reconnaissance de MAGSTATT à BRUNSTATT, a causé de lourdes pertes à l'ennemi et détruit au canon un observatoire, sur la crête du jardin zoologique de MULHOUSE. Exécutant des patrouilles agressives sur DIDENHEIM, à plusieurs reprises, a détruit des armes automatiques et deux panzerfaust ".

NOTE : A BRUNSTATT, le 1er escadron, après une erreur de trajet à BRUEBACH, tombe dans une embuscade au jardin zoologique, constatant la confusion dans l’itinéraire, le peloton revient sur ses « pas » sous un déluge de Panzerfaust. 

Un retour à l’arrière salvateur, les chars légers du 1e escadron n’auraient pas pu résister au nombre et à la puissance des lance-grenades anti-char allemands embusqués ce jour-là à l'observatoire.

Dans la nuit du 24 au 25 novembre 1944, il est avec Les escadrons, dans la tourmente de la contre-attaque massive et foudroyante allemande à GALFINGUE (Haut-Rhin).

Le lendemain, en patrouille son peloton est mis en difficulté par des tirs allemands, le char De SENAILHAC, tire à vue sur tout ce qui bouge face aux servants, puis à l’aide de drapeaux communique avec les autres équipages pour les guider.

Sources : Mémoires de René MEYERE – Membre du 1er escadron – Char Bélier.

De décembre 1944 à avril 1945, le régiment est régulièrement en mouvements en Alsace, il a en charge  de mener des opérations d’harcèlement en direction de la frontière allemande. 
MUNSCHOUSE (Haut-Rhin). 

Le 27 février, à la suite d’une mission de renseignements, il obtient une seconde citation à l’ordre de la Brigade.

" Chef de chars légers, d'un courage à toute épreuve., à l'écluse de  MUNSCHOUSE, chargé de reconnaître la visibilité d'un pont, ne pouvant plus progresser en char, a mis pied à terre sous un feu violent d'armes automatiques ennemies, et, bien qu'atteint par une balle qui a traversé son casque, a continué de progresser avec le même sang-froid et a recueilli les renseignements qui lui avaient été demandés ".

Février - mars 1945. École de Formation des cadres de l’Armée de ROUFFACH (Bas-Rhin).

Note : École de ROUFFAC. Le 20 février 1945, le général De LATTRE de TASSIGNY a confié au colonel Roger LECOCQ ( 1901-1990), le commandement de l’école de formation des cadres de l’Armée .

En août 1946, l’école est transféré à STRASBOURG, un an plus tard elle prend le nom « d’École des sous-officiers » puis École Militaire de Strasbourg en 1958. Dissoute en 1985.

Sa devise « S’élever par l’effort » est aujourd’hui celle de  LÉcole Nationale des sous-officiers d'Active de SAINT-MAIXENT -L'École (Deux-Sèvres).

Il en revient le 31 mars, avec le grade de Maréchal-des-Logis-Chef et remplace au sein du 1er escadron, le maréchal-des-Logis Georges MAUPILLIER comme sous-officier adjoint. Ce dernier sera mortellement blessé dix jours après De SENAILHAC à URERACHEM (Bade-Wurtemberg. Allemagne).

Sources : Mémoires de René MEYERE – Membre du 1er escadron – Char Bélier.

Le 15 avril 1945. Le 1e escadron du capitaine De NAUROIS, en tête du groupement du chef d’escadrons PETIT, s’est heurté à une violente résistance à KÜRZEL

Dans le bilan dramatique de la journée, figure la perte du Maréchal-des-Logis De SENAILHAC.

Quelques jours avant la fin des combats, atteint d'une balle dans la tête alors qu'il était sorti de son char sous un feu violent pour aller secourir deux de ses hommes restés dans le char subordonné qui brûlait (Le Loup – Chef de char LEROY) .

Voilà bien, dans cette fin émouvante, les deux traits dominants de son caractère : une bravoure devenue proverbiale dans son régiment et une incomparable générosité, une suprême noblesse d'âme.

Après son sacrifice, il est cité à l’ordre de l’Armée.

" Chef de patrouille de pointe audacieux et réfléchi ".

Ayant toujours montré un complet mépris du danger. S'est particulièrement distingué le 14 avril 1945 à la prise de LEGELHURST où il a exécuté avec adresse la reconnaissance de la localité, semant le désordre dans les rangs ennemis et sans subir aucune perte. 

Le 15 avril à KÜRZELL, lors d'une poursuite hardie, son char subordonné ayant été atteint par un panzerfaust, n'a pas hésité à sortir de son char sous un feu extrêmement violent pour se précipiter à pied au secours de deux membres de l'équipage restés dans le char en flammes. A, de sa main, abattu un ennemi armé de panzerfaust qui s'apprêtait à détruire un autre char.

Atteint par une balle explosive dans la tête, a été mortellement blessé ".

Les témoignages qui, à la mort d’Éric de SENAILHAC, furent prodigués à sa famille par ses camarades de combat montrent combien sa perte fut cruellement ressentie et la place qu’ il tenait dans, les cœurs. 

Le témoignage du capitaine De NAUROIS, Commandant le 1er escadron.

" C'était une certitude merveilleuse d'avoir à l'escadron un magnifique guerrier comme lui.. Autant en novembre qu'en février, il s'était couvert de gloire, remplissant avec un calme admirable et un complet mépris du danger les missions les plus périlleuses. Il avait de plus une remarquable intelligence militaire. Il vivait son combat et le renseignement qu'il donnait était toujours celui dont j'avais besoin. Il ne comptait que des admirateurs et des amis ".

Ceux de ses camarades.

" Je lui dois tout ; il me faisait travailler au repos pour que je passe sous-officier "

" Éric incarne vraiment à mes yeux l'idéal de la jeunesse française ".

" Il était très grand mais son âme était plus haute que sa taille pourtant magnifique".

" Personne n'a pu l'apprécier sans subir, son influence, sans l'aimer. Il mettait du chic en tout, jusque dans la bravoure. C'est le deuil du régiment ".

Enfin, le camarade désigné pour répondre à l'appel des morts lors de la grande prise d'armes de la victoire a écrit à ce sujet :

"C'est un honneur usurpé. Le héros, le preux du régiment, c'était Éric de SENAILHAC".

Ce suprême hommage les résume tous.


Photographies. Monuments aux morts de MARZENS et de MARZENS (Tarn).

Note : La rédaction du présent article est issue du livre d’or du lycée Gouraud de RABAT (Maroc) , des mémoires de René MEYERE (Membre du 1e escadron), du Journal de marche du 2e Régiment de Chasseurs d’Afrique et des recherches (photographies) d’Hubert PHILIPPE (fils de Maurice PHILIPPE – membre du 2e escadron).

Aucun commentaire: