WIECHS-AM-RANDEN - Récit
Trois officiers suisses nous attendent à l’entrée du village : à quinze pas en arrière, seul, sanglé dans un grand manteau de cuir, s’appuyant d’une main sur sa canne (il a une jambe mécanique chaussée d’une botte…) et de l’autre tenant la bretelle de son fusil, se trouve le lieutenant-colonel… Chef d’état-major du 19°corps d’Armée allemand ; sa figure est celle d’un vrai soldat, les traits crispés par la fatigue et l’émotion ; la visière de sa casquette met de l’ombre sur ses yeux baignés de larmes. Le capitaine suisse transmet alors au capitaine VIE la demande de reddition et fait part des conditions de celle-ci en insistant tout particulièrement au nom du gouvernement suisse.
Le capitaine VIE donne son accord sur tous les points et envoie l’aspirant PRETELAT dans un half-track pour vérifier le désarmement et le dénombrement des troupes rassemblées près de l’église du village.
Le lieutenant-colonel allemand, monté dans une voiture suisse, précède le half-track dans laquelle l’aspirant se tient debout ; pour la première fois, la population d’un village allemand se présente en larmes. Ceux qui, dans quelques instants seront prisonniers de guerre, sont rassemblés dans un pré à gauche de la route, face à l’église, sur cinq rangs. Le colonel, sans arme, annonce 1 187 hommes et 25 officiers. Le rôle des officiers suisses est terminé : confiants en la parole des soldats français, ils se retirent.
À présent, seul en face de l’aspirant, le colonel, chef d’état-major du 19° C.A allemand, dans un garde-à-vous impeccable, remet officiellement sa troupe entre les mains du jeune représentant de l’armée française.
NOTE: Kurt BRANDSTÄDTER
(1902-1963). 1943-1944. Chef d’État-Major de la 16ᵉ Armée – (Front
nord. Russie). Janvier 1945. Chef d’État-Major de la 19ᵉ Armée. Août
1945 - Prisonnier de Guerre
Sa voix, claire malgré les tremblements de sa mâchoire et sa visible émotion, porte loin. Il demande l’autorisation de faire ses adieux à ses hommes et ; se plaçant à côté de l’aspirant, profère d’une voix hachée par l’émotion quelques mots d’au revoir ; puis, d’un pas lent, à côté du colonel allemand, l’aspirant passe en revue cette troupe fatiguée, trempée par la pluie de la veille.
Mais sachant encore regarder en face le chef qui l’a conduite : ces hommes, appartenant à diverses armes, infanterie coloniale, artillerie, aviation, douaniers, infirmiers conduisant des attelages de chiens finnois, évoquent tous les théâtres d’opérations abandonnées par l’armée allemande de l’AFRIQUE à la NORVÈGE.
Le colonel allemand est ensuite conduit en half-track auprès du capitaine VIE pendant que les véhicules du 3° escadron viennent chercher ses hommes qui ne forment déjà plus qu’un lamentable troupeau de prisonniers.
Sources : Ouvrage 2ᵉ R.C.A au combat 1942 - 1945




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