20190707

Du Rhin au Danube avec la 1ère Armée. Une victoire oubliée.



VIDEO I.N.A - Institut National de l'Audiovisuel.
La 1ʳᵉ Armée entre en Allemagne. Baden-Baden. 


Sources: A.N.O.C.R. Association Nationale des Officiers de Carrière en Retraite.

Du Rhin au Danube avec la 1ʳᵉ Armée française, une victoire oubliée.

Plus de quatre-vingts ans sont écoulés depuis la capitulation de l’Allemagne Hitlérienne à Berlin le 8 Mai 1945. 

Cet effondrement du IIIᵉ Reich était dû pour beaucoup aux coups de boutoirs de l’Armée Soviétique sur sa capitale. Cependant, la vigoureuse poussée des Alliés dans tous les Landers du Sud y avait tout autant contribué, du pont de Remagen à ceux de l’Elbe. 

Le général de Lattre de Tassigny et sa 1ʳᵉ Armée avaient fait partie également des artisans du succès avec sa brillante chevauchée menée durant le mois d’avril du Rhin de Germersheim au Danube d’Ulm et aux cols du Voralberg.

Les survivants de ces aventures sont tous, aujourd’hui, nonagénaires ou presque. Il semble donc bon de relater leurs souvenirs en ces temps ou repentance et dénigrement l’emportent sur la fierté d’avoir fait de grandes choses ensemble. 

LE PRÉALABLE D’UN ESPACE DE MANŒUVRE.

Une fois Colmar libéré et l’Alsace reconquise, c’était un devoir pour la France de pénétrer en force en Allemagne, où ses prisonniers et ses déportés attendaient leur délivrance du joug nazi. Absente à Yalta du partage du monde, notre patrie devait à tout prix s’affirmer, non seulement comme pays belligérant, mais encore comme nation victorieuse. 

Ce dessein était ambitieux, car avec ses 7 divisions de 1er échelon, même recomplétées par l’amalgame des Forces Françaises de l’Intérieur, la 1ʳᵉ Armée était bien mince en regard des 80 grandes unités des Anglo-américains, et des 3.800.000 soldats soviétiques engagés à l’est. Pour cela, le tracé de la zone des combats ne nous était pas favorable non plus. Si nous bordions à l’est près de 200 km du Rhin, face au Pays de Bade, nous n’avions face au nord que l’étroite échauguette de Bischwiller tenue par la 3ᵉ Division d’Infanterie Algérienne du général Guillaume. 

Aussi le plan « Eclipse », arrêté au début de l’année, n’avait-il prévu pour les Français, que le forcement du Rhin à Brisach et le contrôle de l’ancien duché de Bade par le Corps d’Armée du général Béthouart. Quant à celui du général de Monsabert, il ne devrait avoir qu’un modeste rôle de deuxième échelon en soutien de la VIIᵉ US Army du général Patch. 

Aussi, avions-nous dû restituer aux Américains tous nos matériels de ponts lourds pour compenser ceux qu’ils avaient dus passer aux Britanniques de Montgomery.

Seul un hasard heureusement exploité pouvait nous ouvrir un passage en rive droite du Rhin et la direction de la trouée de Pforzheim, cette voie d’invasion bien connue de l’Allemagne du Sud depuis nos campagnes de l’Empire. 

L’occasion d’entrebâiller la porte interdite nous est fournie le 15 mars par la percée, sur le front d’Haguenau, de la ligne Anne-Marie. 

Le Général Guillaume, qui en couvre le flanc droit entre Oberhoffen et le Rhin, est arrivé par bonds continuels à doubler la largeur de son créneau. Il est venu s’installer de là sur la Lauter de Scheibenhardt, première localité allemande à tomber entre nos mains le 19 mars. 

Fort de ce succès, le 2ᵉ Corps d’Armée peut, le 23 mars, avec la 3ᵉ DIA et le Combat Command N°6, participer à la rupture de la ligne Siegfried. Au soir du 25 mars, ses forces sont sur les rives de l’Erlen, et contrôlent déjà plus de 25 km du cours du Rhin, au-delà de la frontière franco-allemande. Cette poussée résolue a été payée cependant de plus de 300 tués et de près de 600 blessés.

 Ce sacrifice pourtant n’est pas vain, car il amène le Commandement Allié à revoir de façon plus réaliste son plan d’opération. 

Ces méditations font l’objet au 6ᵉ Groupe d’Armées de l’Instruction N°12 du 28 mars, signée du Général Devers. Celle-ci accepte un élargissement de la zone française jusqu’à Spire et Heilbronn, ainsi qu’un franchissement du Rhin, dont Karlsruhe, Pforzheim et Stuttgart pourraient être les premiers objectifs.

Cette carte blanche inespérée, le Général de Lattre de Tassigny, dont l’état-major est encore à Guebwiller, entend la jouer au plus vite. Dès le 31 mars, les stormboats du 101ᵉ Génie du colonel Ythier, renforcés des équipages des 96ᵉ et 211ᵉ Bataillons de Sapeurs Mineurs, sont prêts, faute d’autres moyens, à tenter un franchissement discontinu.

Le premier passage s’effectue à Spire dans le secteur de la 3ᵉ Division d’Infanterie Algérienne avec les tirailleurs du 3ᵉ R.T.A du Colonel Agostini. Le second essai se joue à Germersheim, dans celui de la 2ᵉ Division d’Infanterie Marocaine, avec le 4ᵉ R.T.M du Colonel Clair et le 151ᵉ RI du Colonel Gandoet. Ensuite, le 2 avril, la 9ᵉ Division d’Infanterie Coloniale avec le Groupement Bourgund et le 21ᵉ RIC passe à son tour en rive droite à Leimersheim.

Mais le fleuve franchi, la poursuite vers le Wurtemberg suppose aussi un élargissement rapide de l’espace de manœuvre vers les crêtes du Kraichgau et le sillon du Pays de Bade.

Malgré l’âpre défense d’un terrain truffé d’ouvrages de soutien du Westwall, la 9ᵉ D.I.C du Général Valluy et le Groupement Navarre avec le 3ᵉ RSM réussissent le 4 avril à entrer dans Karlsruhe. La 2ᵉ D.I.M du Général Carpentier s’est emparée en même temps de Brachial et la 3ᵉ DIA d’Eppingen. De son côté, le Général Dromard, commandant le Génie de la 1ʳᵉ Armée, a réussi à Spire le lancement d’un pont de bateaux de 10 tonnes avec tout le matériel qu’il a pu rameuter dans nos dépôts. Tout est donc prêt pour passer du combat d’une tête de pont à celui d’une rupture en force du dispositif de l’adversaire.

 LA PLAQUE TOURNANTE DE FREUDENSTADT. 

Cette nouvelle phase de la manœuvre peut s’engager sous la forme d’une poussée frontale vers l’est, combinée à une action de débordement vers la droite.

Dans cette intention, la 3ᵉ DIA, articulée en 3 groupements, a été chargée de réduire les massifs du Stromberg et de l’Heucheberg, d’où elle débouche le 9 avril sur le cours moyen de l’Enz.

 La 2ᵉ D.I.M, découplée à sa droite en deux colonnes, s’est occupée en même temps de faire sauter le verrou de Bretten et de s’emparer de Pforzheim. Quant à la 9ᵉ D.I.C, qui a chargé le R.I.C.M du Colonel Le Puloch de réduire la bretelle de Morsch, elle est le 11 avril à Rastatt, tandis que le Groupement Landouzy et le 23ᵉ RIC remontent la vallée de l’Alb. 

Après cet élargissement du front la clef de voûte du dispositif adverse se tient à Freudenstadt. Une localité, qui contrôle le principal col du Hoch Schwarzwald, celui d’où l’on débouche aussi bien vers Pforzheim, Nagold ou Horb, que vers Rottweil et Villingen. Ce donjon, on ne peut le laisser plus longtemps en mauvaise main, si l’on veut s’engager rapidement vers Stuttgart, Ulm ou le lac de Constance.

La réduction de ce bastion a été confiée au Général de Linares mis à la tête de la 2ᵉ D.I.M le 12 avril. Ses troupes, une fois renforcées des 3 Combats Commands de la 5ᵉ Division Blindée, il a engagé le Groupement Chappuis de Neuenburg vers Freudenstadt et le Groupement Schlesser de Pforzheim vers Horb. Quant aux groupements Gazounaud et Navarre, ils ont été chargés de couvrir la progression au Nord-Ouest et au Sud-Est.

 Après 4 jours de combats acharnés, les positions tenues par les 257ᵉ et 716ᵉ Volksgrenadier divisions ont été suffisamment ébranlées pour permettre le 17 avril un contrôle complet de la ville, enlevée par la 151ᵉ RI et le Combat-Command N°5. 

            1. Le 79ᵉ Armée Allemande est désormais coupée en deux tronçons avec son XXIVᵉ Corps d’Armée repoussé vers le nord Wurtemberg et son XVIIIᵉ Corps SS encerclé dans le sud de la Forêt Noire. Le front adverse, ainsi démantelé, il est possible de porter l’effort immédiat vers Stuttgart et d’esquisser une exploitation ultérieure vers le Danube et le Bodensee.

 1945 – BATAILLE DE STUTTGART et DU WURTEMBERG.

Le contrôle du triangle, de Freudenstadt, d’Horb et de Nagold, met Stuttgart à la portée d’une manœuvre en tenaille du 2ᵉ Corps d’Armée. 

La 3ᵉ Division sur le Kreuzbach en forme la branche ouest. La 5ᵉ Division Blindée dans la vallée du Neckar en constitue la mâchoire sud. Quant à la 2ᵉ D.I.M, elle en sera le pivot vers Böbligen et le Schonbuch.

La fermeture du piège commence le 13 avril par la mise en branle de la 5ᵉ D.B du Général de Vernejoul. En plus de ses 3 Régiments de Chars pour l’action en force, elle a le 1ʳᵉ R.E.C du Colonel Miquel comme élément de découverte et le R.M.L.E du Colonel Olie comme infanterie portée. 

Le Combat Command N°5 du Colonel Mozat avec le 1ʳᵉ Chasseur d’Afrique est chargé de percer vers Rottenburg. En même temps, le Combat Command n°6 du Colonel de Lavilleon, avec le 6ᵉ Chasseur, est lancé vers Herrenberg, tandis que le C.C.4 du Général Schlesser assure la couverture de l’opération vers le sud.

Quant à la Dans son secteur, la 2ème DIM a resserré la nasse vers Böblingen, Dagersheim et Deufingen en liaison avec les Tabors de Weil der Stadt. Sur la mâchoire Nord du dispositif les Tirailleurs de la 3 DIA ont été assez heureux pour atteindre la château de la Solitude en fin de journée. Le 49ᵉ RI et le 152 RIᵉ ont fait une entrée non moins remarquée par les faubourgs de Feuerbach et de Kornwestheim. D.I.M, qui doit tenir les flancs de ce coup d’emporte-pièce, il lui faut pousser le 4ᵉ RTM du Colonel Clair vers Wildberg et le 5ᵉ RTM du Colonel Gazounaud vers Seebronn.

Pendant que les blindés, après avoir enlevé Tübingen, atteignent Babenhausen et Reutlingen, les Tirailleurs talonnent les contreforts du Korengau et de l’Herrenberger. Au matin du 21 avril, si les chars tiennent déjà les ponts de Neckarhaussen, le 4ᵉ RTM et le 151ᵉ RI se battent encore durement sur les môles de Oberjettingen et de Kuppingen, tenus jusqu’au dernier homme par les 16ᵉ et 717ᵉ Volksgrenadier divisions.

À gauche, la 3ᵉ DIA a poussé simultanément le groupement de Tabors du Colonel Leblanc vers Weil der Stadt, le 4ᵉ Tirailleur Tunisien sur Renningen et le 3ᵉ Tirailleur Algérien, maintenant commandé par le Colonel de la Boisse, en direction du piton du Lemberg. 

Plus au nord, le 49ᵉ RI du Colonel Pommies marche vers Ditzingen et le 152ᵉ RI du Colonel Colliou vers Ludwigsburg.

 Dans son secteur, la 2ᵉ DIM a resserré la nasse vers Böblingen, Dagersheim et Deufingen en liaison avec les Tabors de Weil der Stadt. Sur la mâchoire Nord du dispositif les Tirailleurs de la 3ᵉ DIA ont été assez heureux pour atteindre la château de la Solitude en fin de journée. Le 49ᵉ RI et le 152ᵉ  RI ont fait une entrée non moins remarquée par les faubourgs de Feuerbach et de Kornwestheim.

Après la réduction le lendemain des derniers groupes épars, il faudra néanmoins se battre jusqu’au 25 avril dans le Schonbuch pour rayer des effectifs les débris du LXIVᵉ Corps d’Armée. 

Malgré l’âpreté des combats d’arrière-garde, la bataille de Stuttgart nous a apporté le bilan d’une victoire. Des 3 divisions chargées de sa défense, 28.000 prisonniers sont entre nos mains. Plus de 80.000 personnes déportées ou contraintes au travail, dont 20.000 Français, ont retrouvé leur liberté. Nos pertes, toujours trop lourdes à l’aube de la fin d’une guerre, se sont limitées à 175 tués et 500 blessés.

 Le Général Chevillon, commandant l’infanterie divisionnaire de la 3ᵉ DlA, peut donc recevoir à juste titre le Gouvernement Militaire de cette cité de 800.000 habitants. Malheureusement de l’orgueilleuse métropole de jadis, il ne reste plus, depuis les bombardements stratégiques de sa zone industrielle, qu’un champ de ruines, que domine encore la carcasse de béton du Tagblatt, le quotidien du pays. 

 UN OBJECTIF CONTESTÉ.

 Le 21 avril, alors que nos forces ne jalonnent encore que la périphérie de la ville, le commandement interallié a déjà décidé, que dès que l’objectif serait tombé, la limite de la zone d’action de la 1ʳᵉ Armée serait ramenée à l’autoroute d’Augsbourg et à la bretelle d’Heilbronn. Le télégramme BX 13260 du 22 avril du Général Devers en a confirmé aussitôt les termes et fixé l’exécution au 25 avril. Cet ordre d’évacuer les lieux est encore réitéré le 24 avril, même si on admet un retour ultérieur de quelques éléments français pour une prise d’armes commune. L’irrévocabilité du projet est d’ailleurs affichée avec l’arrivée le 26 avril d’une division US et l’instauration d’un Gouvernement Militaire américain qui fait double emploi avec celui du Général Chevillon.

 Ces mesures ont évidemment provoqué, on s’en doute, la ire du Général de Gaulle, qui a prescrit aussitôt au Commandant de la, 1ʳᵉ Armée de maintenir ses troupes dans la ville. Aussi, le 28 avril, le général Eisenhower n’aura-t-il d’autre alternative que de s’accommoder à regret de notre présence temporaire dans la capitale wurtembergeoise. 

Ensuite, le litige territorial s’est reporté les jours suivants sur les Kreis de Spire, de Landau, et de Bergzabern tenus dans notre zone des. communications par les gardes du groupement Daucourt et les soldats du 23ᵉ  Régiment d’Infanterie. 

Le différent ne prendra fin que dans la liesse de la capitulation allemande et d’une commémoration à Stuttgart de la fête de Jeanne d’Arc dont le générai Jacob Devers sera l’hôte d’honneur.

 Le différent ne prendra fin que dans la liesse de la capitulation allemande et d’une commémoration à Stuttgart de la fête de Jeanne d’Arc dont le générai Jacob Devers sera l’hôte d’honneur. 

Pendant qu’on se querellait déjà entre occidentaux sur le tracé de nos futures zones d’occupation du IIIème Reich, le groupe d’armées US du général Bradley marquait le pas sur l’Elbe où il attendait l’arrivée des Russes.

Ce fair-play discutable permettra aux Soviets d’essaimer tranquillement pour un demi-siècle dans tout l’Est du pays.

 Rien de cela n’avait empêché les groupements Chappuis et Mozat en débouchant de Reutlingen vers Laiz et Bingen de se rendre maîtres du Jura Souabe. 

Vingt-cinq mille prisonniers s’étaient ajoutés au bilan :des jours précédents. Parmi ceux-ci, il y avait Manfred Rommel alors mobilisé comme auxiliaire de DCA. Il ne manquera point de signaler les conditions dans lesquelles son père, le maréchal, avait été contraint au suicide le 9 octobre 1944.

Une exploitation sans faiblir du DANUBE au VORARLBERG. 

 La 19ᵉ Armée Allemande disloquée, son LXIVᵉ Corps d’Armée détruit, son XVIIIᵉ Corps SS encerclé, le moment était venu d’engager une poursuite à la mesure des possibilités qu’on nous offrait.

Pour cette seconde phase de l’action, le rôle principal revenait tout naturellement au 1ᵉ Corps d’Armée du Général Béthouart. Celui, dont le Chef s’était déjà fait à Narvick en 1940 une réputation impérissable, et qui attendait son heure depuis des semaines en basse Alsace. 

Le Rhin passé à Kehl le 16 avril, les troupes du 1ᵉ CA pouvaient disposer à leur tour de la plate-forme de Freudenstadt pour déboucher dans les trois jours suivants sur l’Est et le Sud de la Forêt Noire. 

Leur engagement est couvert à gauche par la poussée de Monsabert en Nord Wurtemberg. Il est prolongé, à droite, par la 9ᵉ DIC et le C.C.3 du Groupement Valluy qui, après l’occupation de Fribourg le 21 avril, est à même de poursuivre vers le Rhin de Waldshut et de Constance.

 Le premier coup de sabre dans la profondeur du dispositif est donné par-là 1ère Division Blindée du Général Sudre. Découplée en deux Combats Commands, le C.C. 1 du Colonel Gruss dans la vallée du Danube et le C.C. 2 du Colonel Lehr au Sud, elle s’est emparée de Sigmaringen le 22 avril. Le 24 avril, ses avant-gardes sont à Ulm bien que sa zone d’action s’arrête normalement à Ehingen, mais la flèche de la cathédrale la plus haute d’Europe attire nos chars comme la foudre par temps d’orage. 

Au sud de la poche, la 4ème Division Marocaine du Général de Hesdin, renforcée des Combats Commands 4 et 6 de la 5ᵉ DB, a été chargée du nettoyage du flanc oriental de la Forêt Noire. Arrivée le 24 avril au Sud de Villingen, elle accroche le XVIIIème Corps SS qui tente de quitter son repaire du Triberg pour rejoindre le réduit bavarois. Prises entre les colonnes débouchant du Nord-Est et celles du Général Valluy venu à la rescousse, les 89ème, 352ᵉ et 719ᵉ Volksgrenadierdivisions sont définitivement anéanties le 27 avril. Plus de 15.000 prisonniers témoignent de la vigueur de l’empoignade, qui a fait aussi plusieurs milliers de morts et de blessés.

 Nos forces entrées à Constance à la suite de ce nouveau succès, l’occasion se dessine de prendre dans l’étau le Vorarlberg et d’y devancer tous les débris d’unités qui pourraient s’y réfugier. La mâchoire Nord, chargée d’agir sur la direction générale de la vallée de l’Iller, est confiée à la 1ᵉ DB et à la 2ᵉ DIM. L’action d’Ouest en Est à la 5ᵉ DB et à la 4ème DMM qui déboucheront par la cuvette du Bodensee et la vallée de l’Ill.

Lancée au galop le 29 avril sur Innenstadt, la colonne Nord est dans l’Allgau de Sonthoffen le 30 avril, puis à la frontière autrichienne au soir du 1er Mai. Après infanterie et blindés s’engagent délibérément dans les neiges du Hochtannbergpass vers Lech et Zurs. Ces localités dépassées, ils sont le 6 mai à Sankt Anton, tandis qu’un peu plus à gauche, la 44ème ,DI US s’empare de Landeck sur le chemin du col italien du Passo de Resia. 

Tandis que le PC du Général de Lattre de Tassigny se portait à Uberlingen, les éléments opérant à l’Ouest ne sont pas restés, on s’en doute, à la traîne. Débouchant de Stockach, ils ont pris, le 29 avril, Friedrichshafen et Hohenweiler, où légionnaires du 1ᵉ Étranger de Cavalerie et du RMLE ne marquent que le temps d’arrêt minimum pour évoquer Camerone. Au soir de ces festivités, C.C.4 et C.C.5 se retrouvent à Bregenz sur la façade autrichienne du Bodensee. Malgré la mort du Führer, survenue la veille dans les ruines de la chancellerie de Berlin, l’entrée dans cette première ville d’un « pays amis » demande le 1er Mai encore un sérieux coup de boutoir.

 Après le dernier assaut, appuyé par l’aviation et l’artillerie, le mouvement s’accélère. Dornbirn est pris le 2 mai, la frontière de la principauté du Lichtenstein et de Feldkirch sont atteints le 3 mai. La poussée continue le 4 mai par Bludenz et Langen pour prendre liaison, le 6 mai, par le tunnel de l’Arlbergpass avec la garnison de Sankt Anton.

La réduction de son réduit alpin entraîne par voie de conséquence la capitulation de la Wehrmacht. Dès le 4 mai des émissaires de la 24ᵉ Armée Allemande, celle qui défendait Bregenz sont venus à Uberlingen s’enquérir des conditions d’un cesser le feu. Quant à la 19ème Armée, qui depuis Freudenstadt et Villingen n’est plus qu’un état-major sans troupe, elle a préféré faire sa soumission le 5 mai à Innsbruck, avec le groupe d’Armées G, auprès de la VIIème Armée US. 

Épilogue à BERLIN.

La victoire enlevée à l’arraché, tout est prêt, après un premier protocole signé à Reims le 7 mai et l’arrêt des hostilités le 8 mai à 15 heures, pour la capitulation officielle du Reich le 9 mai à Berlin. Cinq ans après le déclanchement de l’offensive de 1940, le Général de Lattre de Tassigny est là pour apposer aussi le sceau de la France à l’acte final de la guerre en Europe, aux côtés du Maréchal Joukov, du Maréchal Tedder et du Général Spaatz. Un honneur que méritait bien cette fulgurante campagne d’Allemagne résumée pour l’histoire dans son Ordre du jour N° 9, pieusement relu chaque année devant nos monuments aux morts, dans le souvenir d’un Chef exceptionnel.

Documentation de référence. 9 avril 2014. Souvenirs personnels de l’auteur 1944-45. Etudes sur le terrain comme Prévôt de la zone Sud FFA 1973-1976. Histoire de la 1Armée Française par le Général de Lattre de Tassigny (.Plon Edition de 1949).

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