20241219

1945.01.20 au 28. CERNAY - LUTZELHOF



Janvier 1945. Les conditions atmosphériques sont épouvantables (tempêtes de neige, verglas, températures en dessous de 15°, les escadrons attendent de pouvoir sortir de cet engourdissement dans lequel les plongent le froid et l’inactivité).

Actualisation janvier 2025.

Le régiment rassemblé dans la région d’ASPACH Le BAS est dans l’attente de passer vers une nouvelle offensive.

Sources : 2ᵉ Régiment de Chasseurs d’Afrique au combat 1942 - 1945. Page 26

Le 8 janvier 1945. Le général Aimée SUDRE, ancien chef de corps du 2ᵉ Régiment de Chasseurs d’Afrique (février 1942 – mai 1943) prend le commandement de la 1ʳᵉ Division Blindée, il succède au général Jean Du VIGIER (capitaine au 2ᵉ R.C.A en 1919).

Le 20 janvier 1945. L’annonce d'une nouvelle grande offensive.

À AHECKEN  (Commune située à mi-chemin entre MULHOUSE et BELFORT - Environ six kilomètres au nord de DANNEMARIE), le régiment qui, depuis la mi-décembre, est dans l’inaction et l’inconfort prend la route de TRAUBACH (5 kilomètres d’HECKEN).

Sur place, une nouvelle attente. La neige tombe à gros flocons, le froid devient plus vif.

En pleine nuit, l'ordre arrive au 3ᵉ escadron de prendre la route. À quatre heures, le départ.

La route est couverte de verglas, les chars chassent de tous les côtés, la neige a recouvert les fossés et par endroits, le secours des arbres est nécessaire pour trouver la trace de la route. Le thermomètre est à -15°, les équipages sont transis. Black-out complet, chefs de chars et conducteurs scrutent la route pour en suivre le tracé. Le visage couvert de givre.

Arrivée à la ferme LUTZELHOF, objectif conquis la veille. Une ferme fantôme qui a subi, au cours de l'hiver, plusieurs matraques n'est que pans de murs et débris calcinés.

Sur place, sont déjà installés dans la ferme, le PC du chef de bataillon du 6ᵉ Régiment de Tirailleurs Marocains. Chacun profite du moindre pan de mur pour s'abriter de la neige qui cingle et des 88 qui arrivent de temps en temps par rafales.

NOTE ; Raymond BAILFF (1904-1990) Chef de bataillon du 6ᵉ R.T.M. Futur général de corps d'Armée. Le 3ᵉ escadron ayant pour mission d'appuyer les fantassins du 6ᵉ R.T.M. dans le cadre de la prise de CERNAY  et du Faubourg de BELFORT.
Sources : Parcours de guerre du 6ᵉ R.T.M. Eric de FLEURIAN.

Le chef de bataillon a installé son P.C. dans l'unique cave qui demeure intacte sous un bâtiment d'habitation déjà bien amoché, réduit, humide et sombre, les tirailleurs sont affalés et transis autour des braseros de fortune dont l'âcre fumée prend à la gorge et fait pleurer les yeux. 

Il faut se cramponner aux murs, car la neige amenée sous les pieds des visiteurs, forme, malgré les quelques braseros, une couche verglacée et bosselée sur laquelle on ne peut se tenir. Le Commandant est là, dans une pièce à part, assis devant la seule table qui a pu être sauvée de cet enfer ; ses adjoints dorment encore, roulés dans leurs couvertures sur cette paille humide et glacée.

Une position défensive est prévue, les chars devront être à proximités des tirailleurs dont la ligne formera un arc de cercle d'un km environ en avant de la ferme.

Un peloton de Tank Destroyers (Lieutenant BOUILLAS du 9ᵉ Régiment de Chasseurs d’Afrique) est aussi chargé d'assister le 3ᵉ escadron (Peloton BERNARD : 5 chars - Peloton SALETES : 4 chars)

La moitié du peloton de TD et le détachement du 3ᵉ escadron devront tenir leurs positions, alors le reste du groupement devra être maintenu en réserve à la ferme.

Pour cette opération, avant le lever du jour, les chars devront être placés.


Aux reconnaissances d'itinéraires, le terrain apparaît comme abondamment miné et, après avoir écrasé plusieurs "shuemines", un T.D. Saute sur une mine anti-char.

Ci-contre le tank Destroyer mis hors de combat - CERNAY - Sources : Archives ECPAD

Des lisières sur lesquelles sont postés les chars, on aperçoit CERNAY et le faubourg de BELFORT. Les chars ne sont séparés que par un glacis de cinq cents mètres et un fossé anti-char. Durant le maintien de leur position, quelques rafales de 88 destinées à la ferme "passent au-dessus des têtes..

Les allemands ne se montrent pas, rares sont les objectifs signalés par les tirailleurs, 

S'avançant vers une maison abandonnée d'où semblent partir les coups, le chef DARNEAU fait cinq servants de mitrailleuses sont faits prisonniers. 

Les journées se passent à grelotter dans le char, il n'est pas possible de sortir des blindés compte tenu de la présence de mines., d'obus, de la neige qui monte jusqu'aux genoux et, parce qu'à la ferme, il n'y a pas d'autres abris.

La nuit venue, ceux qui ont passé la journée en position vont coucher à ASPACH-LE-BAS dans une cave à paille humide, sur place, une détente fort appréciée, il sera est possible de s'allonger complètement et de se rouler dans des couvertures autour d'un brasero fumant.  . 

Aucune maison du village n'a été épargnée et chacun se loge comme il peut, cherchant le meilleur abri contre le froid et les obus qui, jour et nuit, ne cessent de harceler.

Là, est installé l'échelon dont on retrouve les hommes le soir, en rangs d'oignons, sous le mufle des vaches, dans une étable basse à l'atmosphère lourde et puante, mais tiède.

Enfin, ceux qui ont passé la journée à la ferme y passent maintenant nuit dans les chars. 

Quelle n'est pas leur surprise un matin, au réveil (pour ceux qui ont réussi à dormir) de se sentir prisonniers de leur carapace.

Les portes résistent, après un violent effort, on réussit à les ouvrir, c'était le poids de la neige tombée durant la nuit qui résistait. Spectacle unique, la neige a entièrement recouvert les chars, supprimant tout relief, plus de tourelle, plus de carcasse, une seule énorme boule de neige dont sort le canon, coiffé, lui aussi, de blanc.

Ceux qui arrivent d’ASPACH-LE-BAS pour la nouvelle relève pestent contre cette saleté de neige qui a effacé toute trace de chemin et les a envoyés plusieurs fois dans les fossés verglacés d'où les chars patinant, ne veulent plus sortir. 

Les chefs de char, malgré le froid, sont couverts de sueur pour avoir couru devant leur véhicule en pataugeant dans la neige qui leur arrive jusqu'à mi-cuisse.

Sources: Rédaction / Extraits de la narration  - CERNAY - Ouvrage 2ᵉ Régiment de Chasseurs d’Afrique au combat 1942 - 1945  - Bulletins de l'Amicale des vétérans du 2+ R.C.A. Parcours de Guerre 6° R.T.M. Éric de FLEURIAN.

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