À THANN. Arrivée du 4ᵉ escadron au prix de nombreuses difficultés.
Actualisation juillet 2025
La veille, vers 21 heures, le Capitaine De LAMBILLY avait rapporté du Grand P.C. l'ordre d'attaque pour le lendemain et donné ses instructions.
Il n'avait pas caché à ses officiers, que ce serait dur. Chaque équipage était allé procéder aux derniers préparatifs et profiter des quelques heures de sommeil qui lui restaient encore.
Sources: Extraits de l'Ouvrage 2ᵉ RCA au combat. J.M.O
À 6 heures 30, la liaison est prise avec la compagnie, les unités gagnent leur base de départ. Le peloton COQUART doit déboîter sur la droite avec une section et mener l'attaque le long de la Thur. Le peloton HAENTJENS avec une deuxième section doit déboucher sur l'axe,.
Le peloton COQUILLEAU, embossé plus en arrière, couvrira de ses feux la progression des deux autres détachements de l'escadron.
Le jour commence et l'on peut apercevoir, tout au fond de l'immense tapis blanc, les lisières de CERNAY, l'heure H ne va pas tarder.
Soudain, tout s'éveille, les moteurs vrombissent, les monstres rugissent et le feu répond au feu... l'attaque est déclenchée.
Malgré les traces de nos chenilles, les tirailleurs ont de la peine à suivre, la neige leur arrivant au-dessus des genoux, et l'ennemi sournois qui les guette, les frappe, un par un, dans le dos.
Il fait - 25° transis de froid dans leur carcasse d'acier, leur regard rivé aux périscopes, les chasseurs surveillent et mitraillent les points suspects.
Brusquement, la radio se fait entendre : "Allô, Nicolas, sommes en O.I., mais mon véhicule vient de sauter sur une mine, envoyez-moi le Castiglione pour me remorquer".
NOTE : A HEIMSBRUNN (Haut-Rhin) le 26 novembre 1944, le Castiglione a été mis hors de combat, il s'agit du Castiglione II.
"Compris".
Les équipages peuvent voir, devant eux, le Rivoli bien qu'immobilisé près de la route, appuie de ses feux le Marengo qui a atteint les premières maisons de CERNAY.
On se croirait plongé dans un mauvais rêve tant le drame est affreux, de la masse grouillante d'amis, qui, tout à l'heure, marchait dans le sillage des chars, on ne voit plus que quelques taches brunes maculant çà et là l'immense tapis blanc : formes à peine distinctes, enfouies dans la neige ou moribonds rampant vers l'abri le plus proche.
Remontant le peloton, le Castiglione passe. De l'Austerlitz, le Lieutenant crie à l'Aspirant de "FAIRE VITE", puis avoir jeté un coup d'œil sur la gauche, déclenche une bourrade dans le dos de son tireur.
"Attention, regarde... tiens, là, sur la crête, près du pylône... tu ne vois pas les Fritz ? Ces c… là ont leur capuchon blanc."
"Vu, mon Lieutenant, BENES, prépare un explosif" répond le père BIRAT.
Et le canon mène la danse.
Pourtant, la radio couvre le vacarme.
"Allo, URSULE, de RAOUL, éléments de tête près de la fabrique, je n'ai presque plus de fantassins et les fusils sont gelés. "
Dehors, les Minen pleuvent, de partout et les éclatements entourent nos chars de petites cuvettes noires.
Sur nos arrières, les tubes du peloton COQUILLEAU crachent sans arrêt sur les hauteurs nord.
Dans cet enfer de feu, il se joue cependant une partie serrée, le remorquage du Rivoli. À peine le Castiglione est-il arrivé près de lui, que l'aide conducteur CAGNARD, d'un bond, saute à terre ; puis, très calmement, sans s'occuper des six cadavres amis couchés le long des galets, il décroche son câble et l'arrime.
Quelques Fritz, attirés par ce bel appât, se glissent, en rampant vers les chars pour les détruire, mais l'œil vigilant du chef LAROCHE (chef de char du Rivoli) aperçoit le danger et, une seconde après, un violent coup de canon projette en l'air quelques membres humains, tandis que deux boches, devenus à demi fous, viennent se rendre en hurlant. Puis, tels deux frères, dont le plus âgé, blessé à la jambe, s'appuierait sur l'épaule du plus jeune, le Castiglione emmène le Rivoli.
Maintenant, il ne reste plus que deux équipages dans le peloton, deux équipages qui fouillent la plaine et ne peuvent détacher leurs regards des malheureux blessés qui disputent au froid un souffle de vie. Marengo et Austerlitz crachent de temps en temps sur ce maudit fossé anti-char où des ombres semblent bouger.
Faute de renfort, on ne peut plus avancer et les deux pelotons stoppés à la même hauteur s'appellent l'un l'autre pour tuer le temps. "Allô, Raoul, rien de neuf ?. "
"Non, je n'ai plus de fantassins, le Prague vient de se faire bazooker, heureusement dans le barbotin, et on attend sur place."
"Ici, même topo, terminé."
On attend, mais quoi ? Ah, faire quelque chose, si seulement on pouvait balayer ces hauteurs et en chasser les salopards qui l'occupent.
C'est la mission qui, dans l'après-midi, est confiée au lieutenant HAENTJENS, mais, ni l'Austerlitz ni le Castiglione ne peuvent atteindre la cote 425, Les chenilles refusant de mordre dans la neige.
Et les heures passent, tout est apparemment fini... seul, le crépitement de quelques incendies trouble encore le silence de mort qui plane désormais tout autour des chars.
La nuit descend enfin…
Soudain, poussés dans un élan irrésistible, quelques chasseurs sautent à terre, ils courent vers cette plaine qu'ils maudissent, puis, lentement, avec une délicatesse extrême, ils ramènent les blessés et les étendent à l'arrière des chars sur les bâches.
Écœurés par la tragédie qui s'est jouée tout le jour sous leurs regards impuissants, on eut dit que les équipages s'étaient donné le mot "Non, ils ne les auront pas".
Deux pelotons s'enfoncent maintenant dans la nuit. Ils ramènent chacun une vingtaine de blessés, roulant très lentement, pour ne pas secouer leur précieux fardeau dont l'un d'eux, Capitaine Médecin du Bataillon, repose de son dernier sommeil sur le char Austerlitz.
NOTE: Cette journée de combats à CERNAY présente malheureusement un bilan humain couteux au sein des compagnies marocaines. Parmi les victimes, le régiment compte trois des siens ERHRMANN Jules (1914-1945). 3ᵉ escadron - SALVO Jean-Louis (1925-1945) - PASTOR Paul François (1925-1945). 1er escadron – BOURKEHECHE Tayeb Ben M'Hamed (1919-1945) 3ᵉ escadron.
Parmi les blessés, un brigadier et un cavalier (non identifiés) du peloton QUENTIN.
Sources. Bulletins de l'Amicale des vétérans du 2ᵉ R.C.A.



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