Groupement de LABARTHE - Peloton BERNARD. Progression TUTTLINGEN
Au matin, en route pour ROTTWEIL où l’on nous signale des SS décidés à nous créer, parait-il, des ennuis… Nous abordons ce centre sans incident et nous ne remarquons rien de spécial si ce n’est une multitude de drapeaux blancs.
Peu après, TROSSINGEN est atteint et nous apprenons que si tout continue à aller aussi bien, le Danube sera en vue ce soir… Bon Dieu. Ça nous fait quelques choses… Au haut d’une crête, les jeeps de tête réclament les chars. En effet, là-bas, à la corne du bois, une forme grise attire l’attention du Béarn et de l’Île-de-France… mais ce n’est qu’un vulgaire camion. Néanmoins, le Béarn va reconnaître le coin. Il arrive à la crête sans encombre, mais essuie là-haut deux perforants qui heureusement le ratent…
Entre temps, la colonne a démarré. L’Île-de-France part chercher le Béarn. Et nous voilà redescendant à pleine vitesse pour rattraper la colonne. À ce moment-là, nous ne sommes plus que trois chars, le Franche-Comté et un engin du 2° cuirassier étant tombés en panne.
Nous retrouvons la colonne arrêtée à deux kilomètres de TUTTLINGEN et réclamant le secours de chars. Deux jeeps de tête viennent en effet d’être mises hors de combat par des armes automatiques qui interdisent l’entrée de la ville. Le Joubert, l’Île-de-France et le Béarn s’avancent et, bien en vue, car il n’y avait pas moyen de faire autrement, prennent à partie les charmantes villas et les couverts formant les lisières de la ville. En même temps, nous amorçons une spectaculaire manœuvre en ligne à travers champs, tout en matraquant ferme tout ce qui se présente.
Les mitrailleuses se sont tues, et l’entrée paraît maintenant dégagée. Nous nous postons à hauteur des premières maisons et attendons la venue des éléments à pied pour s’engager dans les rues. Profitant de ce moment de répit, les équipages mettent pied à terre pour se dégourdir et boire un petit coup réparateur. Nous recevons à ce moment-là des Minen bien ajustés qui criblent nos bâches et nos sacs, et qui nous font regagner dare-dare nos bonnes vieilles tourelles… une giclée de 75, décochée dans la direction supposée bonne, condamne le mortier au silence.
A ce moment parvient l’ordre d’envoyer un char sur la gauche, appuyer les hommes à pied qui vont nettoyer le secteur. Le Joubert part en tout terrain et s’enlise, le Béarn le remplace pendant que l’Île-de-France garde l’entrée. L’opération s’effectue sans encombre et bientôt l’ordre d’entrer dans le village arrive ; tout le monde se précipite, chars en tête et tombe sur une barricade anti-char ! Heureusement, elle n’est pas gardée et est rapidement enlevée.
Notre entrée se fait prudemment ; avec une observation très active sur les fenêtres. Mais rien n’arrête notre progression, à croire que tout le monde est parti. Puis subitement, nous nous trouvons devant un pont ; il est intact et traversé sans incident. Nous apprenons que nous sommes sur le Danube. Le Béarn a passé le premier immédiatement, suivi de l’Île-de-France. Aussitôt la défense du pont s’organise et les fantassins du capitaine JULIEN se répandent dans la ville.
Les prisonniers affluents, leur nombre sera bientôt incalculable. Les points vitaux sont occupés et tout ne tardera pas à être entre nos mains. Le ravitaillement en tabac s’organise aussitôt et ma foi, nous pensons qu’un bon pot au prochain gasthaus s’impose… C’est alors qu’un avion américain, dans un vrombissement terrifiant, nous gratifie de quelques bombes d’un calibre suffisant pour raser tout un quartier voisin… Alors que nous pensions pouvoir se reposer un peu, l’ordre de repartir arrive à 17 heures.
Nous devons prendre la direction du lac de Constance ! Moteurs et nous voilà revoilà lancés sur la route… Voyage sans ennuis, nous admirons le paysage. La nuit nous surprend à STOKACH où il est décidé de s’installer jusqu’au lendemain. GUICHOT, à son arrivée, pousse une petite reconnaissance vers la gare et tombe nez à nez avec un convoi d’allemands prêt à démarrer… les 75 firent merveille…
Nuit excellente dans de bons lits, surtout qu’au préalable les estomacs étaient abondamment garnis de toutes sortes de bonnes choses… La matinée est employée à l’entretien qui commence à être vraiment nécessaire. Après avoir écrasé et rendu inutilisables quelques dizaines d’armes à feu allemandes, nous repartons de plus en plus belle vers 13 heures, avec ALSTHAUSEN comme objectif.
Sources: Ouvrage 2ᵉ Régiment de Chasseurs d'Afrique au Combat 1942 - 1945
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