Quant au 4ème escadron (Groupement DEWATRE), après s’être porté sur MEYENSHEIM, sans désemparer, le peloton COQUART et le peloton d'A.M. poussent vers le nord en direction SAINTE-CROIX-EN-PLAINE
Une petite colonne se forme aussitôt trois A.M. et deux half-tracks, chargés de zouaves, les chars des maréchaux des logis WEISS (Castiglione) et LAROCHE (Rivoli) derrière, prêts à ouvrir le feu sur toute résistance ennemie.
Viennent ensuite les chars du lieutenant COQUARD
(Phillipsburg), du chef HENGY (Fribourg) et du maréchal des Logis ARNOLD
(Prague).
Sur la route, A.M. et half-tracks se traînent.. le
Castiglione, double, accélérateur au plancher.
Le groupe de chars fonce vers l'inconnu dépassant ces
camarades trop lents.
Au travers des périscopes, les équipages voient devant eux
un immense ruban gris qui s'étire sans fin, tout droit, sur 5 kilomètres de
long, vers SAINTE-CROIX¬-EN-PLAINE.
De grands arbres squelettiques jalonnent la route, de
chaque côté d'immenses champs dénudés et boueux, hérissés de tas de fumier ne
se terminant qu'à l'horizon, de multiples traces partant des villages voisins,
marquent la fuite éperdue des colonnes ennemies. Des cadavres jonchent le sol
et, sur les bas-côtés, des voitures incendiées indiquent que les obus ont fait
bonne besogne.
Dans la tourelle, le chargeur, s'affaire à régler sa
mitrailleuse qui ne marche pas à son gré. L'œil tissé à sa lunette, la main sur
la commande électrique de tourelle, le tireur, scrute le terrain. Jumelle aux
yeux, le chef du Castiglione observe.
Et tout à coup, ce paysage sinistre et lugubre s'agite. Sur
la droite, telle une volée de moineaux, une quarantaine d’allemands
s'éparpillent dans toutes les directions.
Mais la garde était bonne et ils n'ont pas sitôt bougé que
les mitrailleuses crépitent et le canon aboie. Les balles rattrapent, les obus
les hachent et, en quelques instants, plus un n'est en état de se relever.
On dirait que ces premières rafales ont réveillé la plaine
endormie. Les tas de fumier s'animent, s'agitent. Les bas-côtés remuent, il
semble que soudain s’est ouvert une fourmilière.
Calmement, comme à l'exercice, le tireur et l’aide
conducteur rivalisent de précision, tout en roulant, moteur emballé. Jamais il
n’a roulé si vite.
La mitrailleuse de tourelle s'enraye aussitôt elle est
remplacée par celle de capot et réparée en vitesse. Le tir continue, rapide,
haché. Les boîtes de bandes de mitrailleuses se vident aussitôt placées, ils
brûlent plus de 6 000 cartouches.
Et le groupe de chars roule, roule toujours. Le ruban gris est interminable.
SAINTE CROIX EN PLAINE : Char non identifié - Épave.- Collection privée Gilles FEBREL
Brusquement un même étau étreint les cœurs. Tous au même
instant ont vu, à 1 200 mètres, un point noir mais ce point noir a une allure
sinistre. Instinctivement chacun se tourne vers le chef de char, attend de lui
une décision ; Très calmement, après un rapide coup de jumelle, l'ordre est
lancé, impératif "Fonce, fonce".
Malgré lui, le conducteur a de la peine à appuyer sur
l'accélérateur, l’aide conducteur est suspendu à son périscope, le tireur l'œil
toujours rivé à sa lunette sent de grosses gouttes de sueur perler à son
front., le second tireur a rapidement chargé un 75 perforant et observe de tous
ses yeux.
La présence du Rivoli derrière eux les rassure cependant un
peu. Le point noir grossit démesurément dans les appareils de visée. A chaque
instant, ils s'attendent à voir jaillir la longue flamme sournoise d'un 88.
Et le char fonce, à tombeau ouvert.
Tout à coup, à 500 mètres, un cri jaillit de la caisse.
C'est l’un des tireurs qui, se libère brusquement d'un poids énorme exulte sa
joie.
"Ce n'est qu'une voiture brûlée".
"Fonce, fonce" ordonne WEISS et le char fonce.
Le ruban gris finit par tourner et à 300 mètres de là, les
premières maisons de SAINTE-CROIX-EN-PLAINE apparaissent.
Au milieu de la route, un alsacien fait, avec deux drapeaux français, de grands signes pour leur indiquer qu'ils peuvent rentrer dans le village.
Ils n'y trouvent aucun élément des troupes alliées, mais
essuient un tir très violent de l'artillerie américaine. Le Castiglione qui
avait ralenti, repart à belle allure et va aussitôt s'embosser au carrefour
principal.
Quelques secondes après, le Rivoli était là au milieu d'une
foule délirante.
Extrait ouvrage 2ème Régiment de Chasseurs d'Afrique 1942 - 1945. Narrateur inconnu.
NOTE: Le détachement est parvenu à SAINTE CROIX EN PLAINE à 13h15, après avoir capturé 200 prisonniers. Une unité alliée devait rejoindre t initialement les éléments du groupement
À gauche : Le RIVOLI à MEYENHEIM (Collection privée CHERBE Joseph. À droite : Le RIVOLI à SAINTE CROIX EN PLAINE. Source : Le 2° RCA au combat 1942-1945
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